PME, « pré ETI », ETI et grands groupes
On évalue aujourd’hui le nombre d’éco-entreprises en France entre 10 000 et 12 000 .
Le tissu éco-industriel français rassemble aujourd’hui une grande majorité de PME et TPE aux côtés de grands opérateurs nationaux, leaders mondiaux historiques de certaines filières, qui réalisent aujourd’hui de l’ordre de 40% du chiffre d’affaires global des éco-activités en France selon l’ADEME.
Avec ces grands groupes et ces PME, cohabitent des Entreprises de taille intermédiaire (ETI). Nous avons fait le choix de donner une véritable place dans cette présentation aux éco-ETI et « pré-ETI » en raison du potentiel économique qu’elles recèlent. Souvent oubliées, elles disposent en effet de la masse critique pour innover et exporter, sont très créatrices d’emplois et sont de nature à porter toute la filière.
Pour être fidèle à la perception que les acteurs de la filière ont d’eux-mêmes, nous avons choisi de structurer la présentation du tissu productif par la taille des entreprises. Pour être conforme à la vision transmise par les entreprises, il faut conjuguer cette structuration à une approche par secteur tant les particularismes sont importants.
Dans le secteur de l’eau ou des déchets, certaines entreprises existent depuis plus de 100 ans, dans d’autres les entreprises naissent au fur et à mesure des politiques publiques, des réglementations et sous l’impulsion récente de l’économie bas carbone.
Une étude réalisée en 2003 par l’observatoire des PME « Les PME et l’environnement : enjeux et opportunités » dressait les constats suivants :
– Le secteur de l’eau est très concentré autour de grandes entreprises et de leurs filiales. Les PME indépendantes ne représenteraient que 4,5 % du marché en termes de chiffre d’affaires.
– La gestion des déchets est occupée également par des grandes entreprises, les PME totalisant environ 11 % du marché. Les filiales de grands groupes sont également très présentes, ce qui permet aux grands groupes de réaliser un maillage sur l’ensemble du territoire français et laisse peu de place aux entreprises indépendantes.
– Le secteur de la récupération est très largement occupé par les PME qui représentent environ 60 % du chiffre d’affaires. Près de la moitié des entreprises ont pour principale activité la récupération des fers et métaux.
– Le secteur des services compte un nombre important de PME. Hormis quelques cabinets connus, le secteur est composé d’une myriade de petits cabinets ou d’ingénieurs indépendants.
Ces chiffres méritent d’être réactualisés et complétés avec les acteurs de l’économie bas-carbone mais globalement les tendances sur la répartition des acteurs dont le cœur de métier est l’environnement, est cohérent avec notre perception du marché de l’environnement.
• Eco-PME
Les petites et moyennes entreprises cohabitent aux côtés d’acteurs majeurs de l’environnement et de quelques ETI. Sur un échantillon de 1000 éco-entreprises membres de réseaux d’éco-entreprises, on constate que le tissu économique est composé à près de 92 % de PME.
Cette analyse a été effectuée sur cinq réseaux représentatifs de l’activité économique de leur région :
– Bretagne (réseau Bretagne Eco-entreprises) : sur près de 100 adhérents, 89% sont des PME dont 14% n’ont qu’un seul salarié
– Rhône-Alpes (Association APPEL) : sur 100 adhérents, 91% sont des PME dont plus de 60% sont des TPE
– PACA (réseau Ea-Eco-entreprises) : sur près de 100 entreprises, 70% ont moins de 10 collaborateurs et 91% sont des PME
– Nord-Pas-de-Calais (réseau CD2E) : sur plus de 600 entreprises, 54% ont moins de 10 salariés et 96% sont des PME
– Ile-de-France (Advancity, spécialisée sur la thématique ville durable), sur près de 180 entreprises, 83% sont des PME dont 36% ont moins de 10 salariés.
Ce chiffre peut être rapproché du pourcentage de PME, tous secteurs confondus, en France qui représente 97,4% des entreprises (chiffre juin 2009). Le tissu économique des PME de l’environnement semble donc cohérent avec celui du tissu économique en général.
Pré-ETI
Le tissu productif en France a une faiblesse unanimement reconnue, liée à la difficulté de faire émerger de grosses PME et de nouveaux acteurs de premier plan. Un focus a donc été réalisé sur les entreprises comptant entre 150 et 250 collaborateurs et dont le cœur de métier est l’environnement. Un recensement conduit à une vingtaine d’entreprises qualifiées de pré-ETI ; alors que l’on s’attendait à un ordre de grandeur de la centaine d’entreprises, le faible nombre de pré-ETI indépendantes identifiées dans cette première enquête est si étonnamment faible que nous restons très prudents sur la représentativité du résultat et nous devons en conséquence approfondir l’examen du sujet.
Dans les entreprises identifiées le secteur le plus représenté est celui des bureaux d’études qui souvent se sont développés en intégrant de nouvelles compétences environnementales (énergie, gaz à effet de serre, biodiversité).
– On constate que le secteur de l’eau semble absent des pré-ETI. Cela pourrait s’expliquer par le fait que le secteur de l’eau est mature et qu’il s’est progressivement structuré autour d’acteur majeurs entourés d’une myriade de petites structures qui ne réussissent pas toujours à se développer. Un travail plus approfondi mériterait d’être engagé sur le sujet.
– les entreprises du secteur des déchets identifiées, également très anciennes, sont proportionnellement peu nombreuses par rapport aux ETI du secteur.
– Les secteurs du génie écologique et des énergies renouvelables eux paraissent très dynamiques et sont les seuls secteurs « jeunes » qui rassemblent des entreprises de taille significative. Ils peuvent être qualifiés de secteurs porteurs du tissu éco-industriel français.
• ETI : Eco-Entreprises de taille Intermédiaire
Un recensement mené auprès des réseaux d’éco-entreprises membres du PEXE et notre connaissance des acteurs a permis d’identifier une cinquantaine d’entreprises indépendantes de taille intermédiaire dont l’activité principale est l’environnement. Il s’agit d’entreprises françaises ou étrangères comptant 250 et 5000 salariés en France.
Le graphe suivant donne une indication sur la répartition de ces ETI en fonction de leur activité.
On constate qu’un tiers de ces entreprises interviennent dans le secteur des déchets ce qui reflète l’expertise française en la matière et qu’un tiers de l’ensemble des ETI recensées ont pour activité le conseil en environnement. Alors que le secteur de l’eau est également une compétence environnementale clef de la France, il est à souligner qu’il comprend 4 fois moins d’ETI que celui des déchets.
Les équipementiers interviennent principalement dans le traitement de l’air.
Une seule ETI française (hors filiale de grands-groupes) a été identifiée dans chacun des secteurs suivants : les énergies renouvelables, l’instrumentation et la chimie verte.
Le graphe ci-dessous indique la moyenne d’âge de ces ETI en fonction de leur activité.
[GRAPHIQUE 10]
Il est intéressant de noter que l’âge moyen de l’ensemble de ces entreprises est proche de 41 ans. Il s’agit souvent d’entreprises dont le cœur de métier a peu évolué depuis l’origine. Ce constat peut s’expliquer par les éclairages suivants.
• La première raison est qu’une partie des métiers de l’environnement sont très anciens. Il s’agit des métiers historiques et matures tel l’eau et les déchets. On trouve une première génération de sociétés ayant plus de 20 ans d’âge et toujours présentes sur le marché.
• Ce n’est que dans la dernière décennie qu’une nouvelle génération de sociétés est apparue avec la lutte contre les pollutions notamment des sols et la lutte contre les GES. Ces dernières sociétés sont encore en croissance et rares sont celles qui en moins de 10 ans ont atteint la taille d’ETI.
• En dehors des 3 grands groupes qui ont racheté certaines sociétés, la plupart des ETI se sont développées progressivement en gardant un capital tenu par des personnes physiques souvent avec un lien familial.
• Des entreprises à fort potentiel ont été rachetées par des grands-groupes et intégrées dans leurs filiales.
• Les jeunes sociétés ont des difficultés à se développer. Elles sont souvent sous-capitalisées et sont confrontées à des problèmes de trésorerie récurrents.
A l’exception des entreprises recensées dont le métier est la collecte des déchets, toutes ont développé une activité significative à l’international.
Elles ont souvent créées des implantations à l’international et mis en place des réseaux de distributeurs. Parmi les pays les plus souvent cités : Algérie, Azerbaïdjan, Bahreïn, Belgique, Brésil, Chine, Canada, Côte d’Ivoire, Émirats Arabe, Espagne, Inde, Madagascar, Maroc, Mauritanie, Nigéria, Oman, Qatar, Royaume-Uni, Roumanie, Thaïlande, Turquie, Vietnam.
• Grands groupes
Il s’agit d’une part des majors français des services de l’environnement et des grands-groupes d’autres secteurs (construction, énergie) qui ont développé des compétences dans l’environnement au travers de filiales dédiées pour compléter leurs offres et accéder à de nouveaux marchés.
Il existe des publications et une littérature abondante les concernant.
A noter simplement que les axes de développement les plus sensibles ces dernières années sont pilotés par l’émergence de procédés et services en lien avec la diminution des gaz à effet de serre et la diminution de l’impact environnemental de procédés et produits.
Les grands groupes français se sont montrés particulièrement offensifs dans les cleantech en 2011 : parmi ceux déjà actifs, beaucoup se sont renforcés via des acquisitions à l’international dans le solaire, les biocarburants, l’efficacité énergétique, les smart grids, le bâtiment vert, les énergies marines…
• Les entreprises connexes dont le cœur de métier n’est pas l’environnement mais qui ont développé des compétences dans ce secteur
Dans cette classification, les types et profils d’entreprises sont très variés. On retrouve des sociétés de services, des ingénieries, des bureaux de contrôles, des industriels pour qui l’environnement a été considéré comme une diversification répondant à une contrainte réglementaire ou un levier de croissance pour accéder à de nouveaux marchés mais aussi les grands de la construction. On trouve aussi les concepteurs de matériels qui ont développé des produits plus respectueux de l’environnement ou plus efficaces pour la protection de l’environnement et la maitrise de l’énergie.
On note également une tendance « verte » pour les entreprises sous l’impulsion d’engagements (RSE notamment) avec la mise en place de solutions pour réduire l’impact de leurs produits sur l’environnement ou pour répondre à l’évolution des marchés. Cela amène certaines entreprises, qui ne sont pas des éco-entreprises, à intervenir sur le marché de l’environnement.
b) Typologie des métiers
De manière succincte il est possible de classer la quasi-totalité des acteurs privés de la filière dans cinq catégories de métier.
• Les ingénieries, sociétés de conseil en technologies et bureaux d’études
L’ingénierie désigne l’ensemble des fonctions qui mènent de la conception et des études, de l’achat et du contrôle de fabrication des équipements, à la construction et à la mise en service d’une installation technique ou industrielle.
• Les constructeurs
On entend par constructeurs, les entreprises qui construisent des bâtiments, ouvrages, usines, automobiles.
• Les équipementiers
Les équipementiers conçoivent des produits qui interviennent dans la fabrication d’articles contribuant à traiter les pollutions, limiter l’impact sur l’environnement et les émissions de gaz à effet de serre de procédés ou d’autres produits.
Au niveau des procédés sont notamment concernées les entreprises travaillant pour des industriels dans les fluides, les systèmes de protection, l’isolation électrique, phonique, thermique, la manutention…
Les applications sont nombreuses et s’adressent à l’ensemble des marchés de l’environnement : traitement de l’eau potable et usée, valorisation des déchets, production d’énergies renouvelables, métrologie environnementale (eau-sol-air, météo), efficacité énergétique.
Par exemple les équipementiers d’énergies renouvelables conçoivent et commercialisent des composants ou des systèmes complets de panneaux solaires, installations géothermiques, éoliennes…
• Les gestionnaires et exploitants
Le gestionnaire est l’opérateur qui gère un service (traitement d’eaux potables ou usées, gestionnaires de réseaux, collecte des déchets, valorisation des déchets…). Il doit respecter vis-à-vis de la collectivité, les objectifs fixés, entretenir les biens mis à sa disposition et rendre des comptes sur le déroulement du service.
• Les organismes de contrôles et laboratoires d’analyses
Sont particulièrement présents sur le marché de l’environnement français (mesures réglementaires et études environnementales, RSE), 6 grands organismes de contrôle. Ils représentent chacun plusieurs milliers de collaborateurs en France.
En parallèle, des laboratoires d’analyses environnementales existent qui prennent la forme de laboratoires municipaux et de grands laboratoires privés.
c) Des entreprises à l’ancrage territorial fort
On trouve des éco-entreprises sur l’ensemble du territoire métropolitain et d’outre-mer. Ceci, pour deux raisons principales :
– les activités des entreprises de la filière sont en grande partie locales notamment pour les filières eau et déchets, et le deviennent de plus en plus dans l’énergie,
– il n’y a pas dans le secteur de l’environnement de nécessité de rapprocher physiquement les PME des grands groupes en cascade de sous-traitance comme c’est le cas dans les industries intégrées telle l’aéronautique ou l’automobile.
Pour les identifier, un annuaire électronique a été mis en place en 2008 par l’ACFCI. Selon ces données, on dénombre aujourd’hui 11 120 éco-entreprises sur le territoire métropolitain. A partir de ces données nous avons établi une carte qui nous permet de mieux visualiser les disparités régionales qui caractérisent le tissu éco-industriel français (recueil de données se fait de manière déclarative.).
Cette carte met en lumière une très forte densité du tissu éco-industriel dans deux régions : l’Ile-de-France et la région Rhône Alpes, et d’une forte densité dans près de la moitié des régions.
• DYNAMIQUES TERRITORIALES
D’une région à l’autre, la composition du tissu en termes de secteurs d’activités et de répartition des entreprises par rapport à leur taille ne diffèrent pas. Les secteurs des déchets, de l’eau et de l’assainissement, de l’air et également de l’énergie sont ceux qui aujourd’hui rassemblent le plus d’entreprises. Cela confirme les tendances dégagées au niveau national, les secteurs traditionnels dans lesquels la France a acquis une expertise qui s’exporte sont ceux qui génèrent le plus d’activités à l’échelon local tout comme le secteur des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, qui a bénéficié d’une croissance exceptionnelle ces dernières années malgré les aléas réglementaires.
Cependant, même si de grandes tendances peuvent être dégagées des différentes analyses du tissu éco-industriel (analyse selon la taille des entreprises, selon les filières et enfin au regard des territoires), des spécificités régionales existent.
Parce qu’il existe sur certains territoires des volontés d’accompagner et d’animer la filière des éco-entreprises, il est possible d’avoir des connaissances locales beaucoup plus fines.
Les réseaux d’éco-entreprises concrétisent d’ailleurs ces volontés. Il existe une quarantaine de réseaux d’éco-entreprises, qui œuvrent au quotidien pour le développement de la filière, fédérés au sein du PEXE.
On les retrouve sous forme associative (E2iA, Bretagne éco-entreprises) ou bien alors piloté par un acteur local : une CCI (réseau des éco-industries Val-d’Oise/Yvelines, réseau des éco-entreprises d’Alsace, de Lorraine), une agence de développement (Réseau EAU de l’agence de développement de la Réunion, un EPA (réseau des éco-industries de Sénart) entres autres exemples.
Dans le cas d’un réseau porté par un acteur local, le périmètre géographique de l’acteur concerné conditionne celui du réseau : périmètre de la CCI, de l’EPA, du conseil général. Ces réseaux peuvent donc être régionaux (Club éco-entreprises de Midi-Pyrénées ou le Réseau des éco-entreprises d’Alsace par exemple), départementaux (réseau des éco-acteurs du Val-de-Marne) ou parfois même à l’échelle de quelques communes.
Dans les régions peu investies par des volontés de structuration de la filière environnement, les données sont beaucoup plus éparses. On peut remarquer par exemple que la Franche Comté, où il n’existe pas de réseau structuré, est le territoire français où se manifestent le moins d’éco-entreprises.
D’autres encore comme en Provence-Alpes-Côte d’Azur ou dans le Nord Pas-de-Calais concentrent un grand nombre d’éco-entreprises et rassemblent plusieurs réseaux. Cette dynamique régionale s’illustre notamment par la co-existence de pôles de compétitivité, des réseaux tournés vers l’innovation, et d’initiatives locales à l’exemple des entreprises membres du réseau Ea éco-entreprises spécialisées notamment dans l’eau et les déchets et dont les activités s’orientent vers l’export dans le bassin méditerranéen ou de CD2E qui entretien des partenariats avec 73 clusters à l’international.
L’annuaire mis en place par l’ACFCI qui recense de manière déclarative les éco-entreprises en France en dénombre 12 261 sur le territoire métropolitain et dans les territoires ultra-marins.